vendredi 10 décembre 2010

Pourquoi ''People'' ou ''Politique'' il faut choisir

Michel Drucker a confié sur le plateau de l'émission "On n'est pas couché" qu'il n'avait pas l'intention d'inviter Marine Le Pen, tout comme il n'avait pas invité son père, Jean-Marie Le Pen.

En tant que maître d'orchestre de l'émission c'est son droit le plus strict à l'animateur. Il décide pleinement de qui il invite. Tout comme on peut concevoir que sa conscience lui interdit de recevoir une personne représentante d'un parti aux idées qu'il ne doit pas porter particulièrement dans son coeur. Honnête de sa part. Car c'est une émission de divertissement, avant tout. Dans ce cas, une alternative, peu crédible et fantaisiste j'en conviens, serait que Michel Drucker cède sa place, le temps de cette émission avec Marine Le Pen ?

Cependant, Michel Drucker en ''politisant'' son émission se frotte donc aux limites de cet exercice généralement périlleux. Car on quitte le terrain de la neutralité, de l'amusement, du divertissement pour un autre aux règles du jeu totalement différentes et aux conséquences plus visibles et nettement plus sensibles pour la démocratie. Celui de la pluralité des expressions, de l'égalité de temps de parole, de la représentativité de ceux et celles qui nous gouvernent ou aspirent à nous diriger.

A ce titre, Michel Drucker commet donc une première entorse. Dans tout jeu, il faut en accepter les règles, qu'on les aime ou pas. Car, ne pas les respecter, revient à tricher avec ces mêmes règles.

La deuxième limite, que révèle cette affaire, est la nocivité du mélange des genres, tendance également appelée ''la pipolisation'' de la classe politique. Comme on le voit, cela crée des tensions et une perte de repère pour tous. Animateur et spectacteur.

Troisième effet qui secoue et, qui, est, probablement, le plus grave : la stigmatisation d'un leader et de son parti représentant une part significative des citoyens. Or, comme le démontre l'histoire récente, cette ostracisation, contrairement à ce que pensaient ses partisans, a eu l'effet inverse à celui initialement recherché : au lieu d'assister à la morte lente du parti, en l'occurrence le Front National, celui ci n'a cessé de renforcer son audience au cours des dernières années. Donc preuve en est que ce n'est pas la bonne méthode pour l'éliminer de la scène politique. Comme les responables politiques, Michel Drucker se trompe de moyen pour parvenir à une fin parfaitement louable.

De la discussion jaillit toujours la lumière. Autrement dit, se dévoilent à la fois les qualités et les défauts de notre interlocuteur. Mais ce n'est pas l'essence même de l'émission de mettre en difficulté l'invité d'honneur. Voilà  Michel Drucker n'entend pas partager le plateau avec la leader du Front National car il veut de la détente et non de la confrontation. Un dimanche soir, il faut reconnaître, ce n'est pas le moment, tous minés que nous sommes à l'idée de reprendre une semaine de travail ;-))

En revanche, Marine Le Pen rappelle une vérité, difficile de passer sous silence, en affirmant "qu'il y a un service public, que ce service public il est financé par les contribuables français et que M. Drucker, comme l'ensemble des autres journalistes qui travaillent sur le service public, ont un devoir". Donc j'en reviens à une des idées émises plus haut : pourquoi Michel Drucker exceptionnellement n'exercerait il pas son droit de retrait ?

Mais il y a, bien sur, un facteur rédhibitoire jusqu'ici pour la future leader du FN : faire le ménage dans ses rangs et surtout idéologique, autrement dit, se débarrasser des idées les plus crasses du programme du FN, gagner donc en respectabilité. Et ainsi devenir fréquentable selon nos principes fondamentaux de la République et aux yeux de Michel Drucker et d'autres présentateur. Marine le Pen est-elle prête à cet aggiornamento ?
Une polémique, aussi modeste soit elle - comparée aux enjeux de notre pays et des problèmes de nos concitoyens - est, tout de même, révélatrice du fait que politique et show business ne font pas forcément bon ménage. Que leurs connections, sans cesse plus étroites créent une réelle confusion nuisible, à la longue, au bon fonctionnement de notre démocratie. On se sent mal à l'aise. Comme une impression de nager en eaux troubles... en espérant que notre régime politique ne boive pas le bouillon...

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