vendredi 26 novembre 2010

Europe : vol au dessus d'un nid de ''fous''

Ou comment le sol se dérobe sous les pieds de nos responsables politiques et acteurs économiques, à l'instar des banques. Depuis plusieurs jours, c'est à une vraie débandade que nous assistons. En référence à ce phénomène naturel quand la glace fond au pôle nord et qu'elle se disperse dans les océans.

La volonté de nos politiques de reprendre la main, de nous faire croire qu'ils contrôlent un tant soit peu la situation ressemble à ce chaos qui saisit le monde polaire au printemps. Leur détermination semble bûter tragiquement contre le mur d'une réalité ou triomphe la raison froide et au coeur de pierre.

Autrement dit, celle de la mathématique et de la logique économique.

Tel est le tableau de la Méduse, non sans excès, de notre scène politique européenne face à la déroute financière de l'Irlande, après celle de la Grèce. Avant celles probables du Portugal et de l'Espagne, même si les situations sont totalement différentes. Mais la raison s'est fissurée, le sang froid volatilisé.

D'où cette panique qui gagne les principaux protagonistes et les marchés. Un vent glacial nous saisit. Car jusqu'ou la dégradation peut-elle aller ? Qui sera la prochaine victime de ce blizzard qui souffle sur les capitales européennes et met sur le flancs les pays, au demeurant très fragilisés au plan économique, sans espoir de pouvoir se relever avant une dizaine d'années ?  Un constat terrible. Mais pourquoi se mentir. C'est cet avenir entre gris clair et gris foncé qui nous attend, tous les économistes s'accordent à le dire. Seuls les politiques font dans l'illusion, jouent au poker menteur, pleinement dans leur rôle, de plus en plus pathétique.

Nos économies comme le roi sont nues. Leur vulnérabilité éclate au grand jour. La tricherie devient désormais impossible.  Après tant d'années de grand bluff. Sans que les opinions s'en émeuvent outre mesure d'ailleurs.

Or nous savions tous que nous jouions avec le feu, que c'était un pure numéro d'équilibriste très précaire au-dessus du vide, sans filet. Inutile d'être grand clerc ou sortir de l'ENA au regard d'un tableau économique très poussif (une constante depuis vingt ans pour certains indicateurs) notre croissance atone, un chômage fort, des investissements en berne, une consommation qui commence à chanceler, des déficits publics aux sommes colossales... pour prévoir le scénario du pire d'aujourd'hui.

Pour l'Europe, et les Etats-Unis mais semble-t-il dans une moindre mesure (croissance de 2,5% selon les dernières statistiques contre à peine 1,5% chez nous), pour être précis les peuples d'Europe, l'addition sociale est extrêmement lourde. Nous payons à la fois ainsi le laxisme (pour ne pas dire la lâcheté) de nos décideurs politiques, l'absence de leadership, la défaillance des élites (qui ne veulent pas voir), l'incompétence de certains, l'incohérence d'une construction à marche forcée d'un monstre administratif européen et non d'une véritable force politico-économique...

Face à la mobilisation sans pareil en Irlande, aux protestations en Angleterre, à la contestation au Portugal et à la Grèce, voilà que de financière puis d'économique, la crise devient réellement sociale. La ligne rouge est donc en train d'être franchie. Et nourrit les plus vives inquiétudes.

En effet, il y a rien de pire que des peuples en colère, excédés. Avec, dans ce cas, et tout naturellement, comme  prochaine étape, une crise politique majeure. Avec le pire des dénouements : un vote contestaire très important qui s'exprimerait massivement dans les urnes en faveur de partis populistes. Ces derniers sont en constante progression. Une perspective que beaucoup rejette. Probablement par lâcheté. Ou, à tort, convaincus que l'Histoire ne se répète pas. Sauf qu'aux même causes, mêmes effets (mêmes sanctions).

Comme l'écrivent dans une tribune commune, l'économiste Michel Aglietta, et l'ancien premier ministre Lionel Jospin, dans Le Monde en date du 23 novembre 2010 : "En 2012 et 2013, la croissance européenne risque fort d'être très basse. Les déficits ne diminueraient pas, les dettes publiques grimperaient et le chômage monterait encore. Les tensions sociales s'aggraveraient et les mouvements nationalistes et populistes, déjà en hausse en Europe, pourraient bien s'en trouver renforcés.''

L'Europe, sans conteste, en ce moment, vole au-dessus d'un nid de ''fous''... Or la folie peut être soit créatrice, soit déstructrice, à nous de choisir...

> A lire ''la faillite des Etats'', dossier Le Figaro

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